Tristesse et déshonneur ! Les mots ne sont pas appropriés pour traduire le sentiment des nigériens avec lesquels Dakaractu s’est entretenu sur la situation de leurs compatriotes qui occupent certaines artères de la capitale du Sénégal sous prétexte de fuir la famine.
Selon plusieurs interlocuteurs de Dakaractu, cette activité qui s’apparente à la mendicité exportée est entretenue par des réseaux qui viennent d’une même région. Un trafic qui n’est visiblement pas à son apogée puisque début mars, une quarantaine de nigériens ont été interceptés à Kidira alors qu’ils étaient en partance pour Dakar. Les convoyeurs ont été jugés et condamnés à 2 ans dont 6 mois ferme de prison.
De son côté, le gouvernement nigérien exprime sa surprise d’autant qu’il trouve que « la présence de ces personnes n’a aucun rapport avec la situation sécuritaire lié au terrorisme ou au déficit alimentaire. »
« Trafic illicite de migrants… »
Par le biais d’un communiqué signé par le porte-parole du gouvernement, Tidjani Idrissa Abdoulkari, les autorités nigériennes affirment qu’« il s’agit d’un trafic illicite de migrants et de la traite de personnes organisées par des groupes criminels en direction de certains pays voisins et même au-delà ». Dans l’immédiat, des instructions ont été données aux services compétents en vue d’évaluer la situation sur place en rapport avec les autorités sénégalaises et de prendre les mesures appropriées. Ensuite, des dispositions seront prises en vue de regrouper ces personnes dans des sites sécurisés en attendant leur prise en charge de façon conséquente.
Joint par téléphone, l’ambassadeur du Niger a confié à Dakaractu que « toutes les dispositions sont en train d’être prises pour solutionner ce phénomène ».
Pour le moment, rien n’est encore fait. Les sans-abris occupent toujours le Boulevard du Canal 4 de Fass- Gueule Tapée et à notre arrivée ce 22 mars un peu avant la tombée de la nuit, étaient plus méfiants vis à vis de la presse.
La mendicité n’est pas l’apanage des nigériens
Quelle que soit l’issue de cette affaire, il est utile de préciser que la mendicité a la peau dure sous les cieux sénégalais et qu’il n’est pas l’apanage de ressortissants du Niger. Le département d’État américain rapporte en 2021 qu’au Sénégal, « ces cinq années, des trafiquants d’êtres humains exploitent les victimes nationales et étrangères ». Le même rapport fait remarquer qu’une ONG a estimé que 100 000 enfants vivant dans les daaras résidentiels sont contraints à mendier. Dans ce nombre, 30 000 seraient recensés à Dakar. Le département d’État ajoute qu’en 2017, une étude a estimé que plus de 14 800 enfants sont victimes de la mendicité à Saint-Louis. Dans le cadre de ses efforts pour identifier et protéger les victimes de la traite, le gouvernement sénégalais a identifié et orienté vers les services appropriés 129 adultes étrangers victimes de la traite en provenance de Sierra Leone, du Nigeria et du Burkina Faso. 6.187 enfants, dont des victimes potentielles de la traite, sont concernés par cette mesure contre 1.358 enfants au cours de la période précédente…